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À vos marques, prêts, assis !

En réfléchissant à ce que je pourrais apporter comme méditation il m’est venu à l’esprit le mot « assis ». Ce n’est évidemment pas de manière autonome que j’ai eu cela à cœur, mais c’est l’Esprit de Dieu qui m’a rappelé certains passages de l’Écriture où nous trouvons ce mot. Le contexte n’y est pas pour rien non plus. Si la position « assis » évoque

parfois dans la Bible le repos après un dur labeur, ce n’est pas la majorité des cas. La plupart du temps lorsqu’un personnage biblique est assis c’est en général pour lui l’heure de glorieuses expériences spirituelles. Et si cette période que nous vivons était une invitation à nous assoir aux pieds du Seigneur ?

Nous nous plaignons de trop courir, de ne pas avoir le temps y compris pour ce que nous savons essentiel. Il se peut que pour certain, le confinement aura permis au moins ça de bon, ils ont retrouvé du temps. Encore faut-il maintenant en user sagement en venant nous assoir, pas n’importe où, devant n’importe quoi ou n’importe qui mais devant le Seigneur qui nous invite à retrouver la plus glorieuse des positions, assis à ses pieds. Au-delà de notre sagesse qui nous pousserait à cela, Dieu par ces temps que nous vivons nous y contraint lui-même, et cela nous devrions le discerner.

J’aimerais qu’on se penche sur trois passages de l’Écriture ou le terme « assis » est utilisé.

Assis pour apprendre

Le 1er passage nous parle de Jésus qui est assis dans le temple. « Au bout de trois jours, ils le trouvèrent dans le temple, assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant. » Lc 2.46

La réponse de Jésus à ses parents est surprenante : « Ses parents furent très étonnés de le voir là, et sa mère lui dit : - Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Tu sais, ton père et moi, nous étions très inquiets et nous t’avons cherché partout. Pourquoi m’avez-vous cherché ? leur répondit Jésus. Ne saviez-vous pas que je dois m’occuper des affaires de mon Père ? »

Ce qui surprend ici, c’est que Jésus n’est pas en train de prêcher, de faire des miracles, de guérir des malades, il est encore loin de s’offrir en sacrifice pour les péchés de l’humanité. Il n’a que 12 ans (12 ans est un âge charnière pour les garçons juifs car à 13 ans le jeune juif devient responsable au regard de la Loi. Selon Flavius Josèphe, Samuel devint prophète à l’âge de 12 ans), et pourtant ce qu’il est en train de faire dans le temple, c’est-à-dire s’instruire auprès des docteurs de son peuple, est pour lui un moyen par excellence de s’occuper des affaires de son Père. Il se peut que cette période de confinement soit pour nous difficile à vivre car nous pensons notre service pour Dieu au point mort ou en tout cas tellement réduit que cela peut causer de la frustration. Ce passage devrait nous aider à considérer sous un jour nouveau ce que signifie servir Dieu. S’occuper des affaires de notre Père céleste, cela commence lorsque nous nous asseyons devant lui comme un enfant prêt à recevoir l’instruction de son père. Ce passage de l’Écriture, nous montre que servir Dieu commence par l’humble attitude de nous mettre à son école pour apprendre de lui. Tout ce qui peut contribuer à nous faire grandir dans la connaissance de Dieu devrait être considéré par les croyants que nous sommes comme le 1er service que nous rendons à Dieu. 

Notez que l’attitude du Christ, n’est pas passive, il écoute et il pose des questions. S’assoir devant Dieu ne sera jamais une affaire d’oisiveté mais toujours d’une recherche active du Seigneur. Une telle soif d’apprendre met en évidence l’amour que le Fils porte à son Père. C’est ainsi que nous devons nous assoir aux pieds de notre Père céleste, en étant pleinement actif dans la poursuite de sa connaissance.

Je note enfin que Jésus n’était pas assis seul devant Dieu mais en présence des docteurs et des autres auditeurs. Quelle humble attitude qu’il nous faudrait imiter plus souvent. Il se met au même rang que les autres élèves présents ce jour et recevant l’instruction des docteurs d’Israël. Notre orgueil nous pousse trop souvent à croire que nous n’avons besoin de personne pour apprendre de Dieu. Jésus qui est pourtant Fils, a appris à connaître son Père par les voies normales de l’apprentissage. Même si nous n’irons peut-être jamais à l’école biblique, surtout en ces temps, nous devrions néanmoins nous mettre au bénéfice du ministère des docteurs que le Seigneur a donné à son peuple. En cette période de confinement, je vous suggère de vous assoir devant Dieu avec votre Bible mais aussi de recourir à des ouvrages chrétiens de qualité afin de vous instruire de Dieu.

Assis, pour écouter dans l'amour

Le second passage sur lequel s’est porté mon attention concerne Marie de Béthanie. « Comme Jésus était en chemin avec ses disciples, il entra dans un village, et une femme, nommée Marthe, le reçut dans sa maison. Elle avait une sœur, nommée Marie, qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole. Marthe, occupée à divers soins domestiques, survint et dit : Seigneur, cela ne te fait-il rien que ma sœur me laisse seule pour servir ? Dis-lui donc de m’aider. Le Seigneur lui répondit : Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et tu t’agites pour beaucoup de choses. Une seule chose est nécessaire. Marie a choisi la bonne part, qui ne lui sera point ôtée. » Lc 10.38-42

Ce texte, toujours dans l’Évangile de Luc, a été l’occasion de nombreux sermons. Jésus, nous dit l’Écriture, aimait la famille de Marthe (son frère Lazare et sa sœur Maire), j’ai également une affection particulière pour cette famille. Pour Marthe servir son hôte, qui plus est Jésus, était le plus grand des devoirs. Elle ne pouvait pas comprendre que sa sœur soit là assise aux pieds de Jésus, alors qu’elle aurait dû retrousser ses manches et enfiler son tablier pour l’aider aux soins domestiques. Marthe n’envisagea pas un seul instant que sa sœur puisse avoir à ce moment, la plus noble des attitudes. Mais c’est que l’Évangile est choquant. Il renverse notre échelle de valeurs, il prend le contrepied à ce que nous pensons important. Concernant Marie, elle avait dû discerner quelque chose de particulier concernant le Christ. Quelque chose qui lui suggéra, que la place la plus importante où elle puisse se trouver à cet instant, n’était pas aux soins domestiques mais aux pieds du Christ pour écouter sa Parole. Marthe pensait sans doute que Jésus avait besoin de ses services. Marie, par sa position aux pieds du maître, confessait qu’elle avait besoin des services du Seigneur. C’est là tout l’Évangile ! Le mystère d’un Dieu qui s’abaisse pour venir nous secourir. Jésus dira qu’il est venu non pour être servi mais pour servir et donner sa vie en rançon (Mt 20.28). Pour être sauver et se mettre au service de Dieu il faut en premier lieu accepter que Dieu nous « serve ». Je sais que cela est choquant, mais la nécessité l’impose. En effet, nous sommes pécheurs. Nous avons absolument besoin de pardon et que nos plaies soient pansées. Nous avons également besoin d’une véritable espérance pour pouvoir marcher dans cette vie. C’est ce que Jésus nous propose. Alors pourquoi ne pas nous assoir à ses pieds pour nous mettre au bénéfice de sa Parole. Le laisser nous parler de son amour infini et en vivre.  

Ce texte ne signifie pas que Jésus soit opposé à notre service pour lui, mais il est contre une activité qui n’a pas trouvé son fondement en lui. C’est pourquoi, il dit que la part de Marie ne lui sera jamais ôté. C’est cette même Marie qui prit une livre de parfum de nard pur d’un grand prix et qui oignit les pieds de Jésus en vue de sa sépulture. Jean mentionne le fait que la maison était remplie de l’odeur du parfum (Jn 12.1-8). Enfin, Jésus dira qu’on racontera aussi en son souvenir ce qu’elle a fait (Mt 26.6-13). Le temps passé aux pieds du Christ n’est jamais perdu.

Si Le geste de Marie (le parfum répandu) a pu paraître extravagant pour certain, son geste était un juste retour envers celui duquel elle avait discerné l’amour. Un amour sacrificiel. Son geste, un acte d’amour et d’adoration qui pris naissance ce jour ou elle fût assise aux pieds du Seigneur pour écouter sa Parole. Le Seigneur doit avoir la prééminence en toute chose, y compris dans ce qui motive notre œuvre à son égard. C’est son amour qui doit être le fondement de toute notre action. Cela commence à ses pieds, par recevoir de lui.

Assis pour pleurer, dans la compassion

Pour le troisième et dernier passage de notre méditation, je vous propose un saut dans l’Ancien Testament, nous nous arrêterons sur la personne de Néhémie.

« Lorsque j’entendis ces paroles, je m’assis et je me mis à pleurer. Pendant plusieurs jours, je pris le deuil, je jeûnai, je priai devant le Dieu du ciel ; je dis : S’il te plaît, SEIGNEUR, Dieu du ciel, Dieu grand et redoutable, toi qui gardes l’alliance et la fidélité envers ceux qui t’aiment et qui observent tes commandements ! Je t’en prie, que ton oreille soit attentive, que tes yeux soient ouverts, pour entendre la prière que je t’adresse, moi, ton serviteur. Je suis en prière devant toi aujourd’hui, jour et nuit, pour les Israélites, tes serviteurs, en confessant les péchés des Israélites, nos péchés contre toi ; moi et ma famille, nous avons péché. » Né 1.4-6

Ce qui me frappe chez Néhémie c’est sa capacité à s’identifier à la souffrance et au péché de son peuple. Le concernant, il occupait une place confortable au sein de l’empire perse. Il était loin de vivre ce que le reste du peuple d’Israël endurait à Jérusalem. Pourtant, plein de compassion, leur douleur était la sienne, leurs péchés les siens, alors que le livre de Néhémie suggère en lui un homme pieux. 

Je trouve que ce texte sied particulièrement à notre situation. Notre pays est dans une situation terrible, le monde entier également. La crise sanitaire qui aujourd’hui fait de nombreuses victimes aura demain des conséquences sur l’économie mondiale. A l’instar de ce que vivait les Israélites, notre société présente de grosses brèches, un feu à embraser notre monde. Cependant, comme Néhémie plusieurs parmi nous vivent cette situation de loin. Nous sommes, heureusement pour plusieurs, dans nos maisons, à l’abri du danger. Pourtant Dieu nous appelle à nous assoir et à considérer l’ampleur de la crise que nous traversons. Il nous appelle à nous identifier à la souffrance qui touche nos sociétés. Pour cela il faut s’arrêter et s’assoir. Il faut accepter de regarder la situation et au jour du malheur, réfléchir (Ec 7.14). Dieu nous invite à nous assoir pour pleurer sur notre monde, il nous invite à nous assoir pour mener deuil. 

Mais voyez-vous, Néhémie ne s’assoit pas seulement pour pleurer sur une triste situation mais aussi pour confesser les péchés de son peuple et de ses pères qui sont à l’origine de la crise que son peuple traverse. Néhémie ne confesse pas de manière détacher le péché des autres, il s’identifie à leurs offenses comme si elles étaient les siennes. Le Christ lui-même s’identifiera à son peuple pécheur en recevant le baptême de Jean. Ainsi, nous sommes invités à nous assoir et à confesser car il nous faut envisager ce que nous vivons sur l’ensemble de la planète, comme la conséquence des péchés d’une société mondialisée. L’amour du Christ ne nous pousse pas à pointer du doigt les offenses des autres mais à nous assoir pour confesser premièrement nos propres péchés, puis ceux du peuple de Dieu auquel nous appartenons et enfin à confesser les péchés de ce monde rebelle à Dieu comme s’ils étaient les nôtres.

Pour toutes ces raisons que je viens d’évoquer, à vos marques, prêts, « assis ».

 

Johan Benouala